Internet en prison
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- Date de dernière mise à jour : 6 novembre 2024
En France, aucune loi n’interdit formellement l’usage d’Internet aux personnes détenues en prison, mais pour des raisons de sécurité, l’administration pénitentiaire prohibe toute connexion sur le web. Pourtant, les détenus sont de plus en plus nombreux à publier du contenu sur les réseaux sociaux, et vont parfois jusqu’à faire exploser les compteurs de followers. Voici ce qu’il y a à savoir sur l’utilisation d’Internet dans les cellules de France.
Que dit la loi concernant l’utilisation d’Internet en prison ?
En 2004, une note posée par voie administrative interdisait aux personnes détenues d’accéder à Internet et au système d’information extérieur. Renouvelée en 2009, malgré le fait que cette norme accentue encore davantage la fracture numérique, cette dernière ne constitue en aucun cas une loi et pourrait par conséquent rapidement faire l’objet d’un retrait pour permettre aux personnes écrouées d’utiliser enfin l’outil numérique en prison.
Aucune loi existante n’interdit l’usage d’Internet aux personnes détenues
Simple norme et non pas réelle loi, l’interdiction d’accès à Internet aux personnes incarcérées dans les établissements pénitentiaires provient d’une note de 2004 qui s’intitule « interdiction faite aux détenus d’accéder à Internet et à tout système d’information extérieur ».
Légalement privées d’informations, d’outils nécessaires à leur réinsertion et de communication avec l’extérieur, les personnes écrouées sont de plus en plus nombreuses à déjouer les règles.
Des craintes liées à la sécurité évoquées par l’administration pénitentiaire
Si la note mentionnée ci-dessus n’a pas été révisée, c’est en partie à cause de craintes liées à la sécurité qui ont été évoquées par l’administration carcérale. En effet, en ayant accès à une connexion Internet, certains détenus pourraient tenter d’intimider leurs victimes qui se trouvent à l’extérieur, continuer de gérer leurs business depuis la prison, ou encore consulter des sites web faisant l’apologie du crime.
De manière illégale, ceux qui sont placés en détention parviennent déjà à réaliser diverses missions numériques, sans qu’aucun contrôle ne soit exercé par l’administration pénitentiaire, l’usage d’Internet se faisant exclusivement dans son dos.
Quelles sont les conséquences de l’absence de connexion Internet dans les prisons ?
Si être privé de connexion Internet durant plusieurs mois n’entraîne que très peu de conséquences sur la réinsertion des personnes condamnées à de brèves peines, les détenus qui sont privés d’accès au web pendant plusieurs années voire décennies, eux, sont particulièrement lésés.
Une accentuation de la fracture numérique pour les détenus incarcérés
En effet, les personnes incarcérées pour une longue durée sont concernées par une fracture numérique difficile à vivre au moment de la libération. À l’heure où la majeure partie des formalités administratives s’effectuent désormais en ligne, certains ex-détenus sont dans l’incapacité d’utiliser l’outil Internet à leur sortie de prison.
Pour accéder à leurs droits, trouver un emploi ou encore informer les organismes de leur situation, ces derniers rencontrent bien souvent de lourdes difficultés.
Des détenus privés d’accès à des outils utiles pour la réinsertion sur Internet
Informer la CAF d’un changement de situation, postuler à des offres d’emploi en ligne ou encore consulter leur compte en banque sont autant de démarches effectuées au quotidien par la population qui sont inaccessibles aux personnes incarcérées. Cette rupture numérique compromet grandement leurs chances de réinsertion et leur accès aux droits sociaux, au logement et à l’emploi.
Comment les détenus parviennent-ils à accéder à Internet depuis leurs cellules ?
Malgré l’interdiction faite aux détenus d’utiliser Internet, certains parviennent à accéder au web depuis leur cellule. En effet, via un smartphone et une carte SIM régulièrement alimentée, ces derniers parviennent à se connecter, communiquer avec l’extérieur, alimenter leurs comptes sur les réseaux sociaux et naviguer sur les sites Internet qui les intéressent.
Des smartphones qui permettent aux personnes incarcérées d’accéder à Internet
Les smartphones sont présents en prison. Malgré de nombreuses fouilles effectuées par les surveillants pénitentiaires, les détenus parviennent à faire entrer lors de parloirs ou grâce à des drones ou paquets jetés depuis l’extérieur de la prison des téléphones et cartes SIM prépayées.
Depuis leurs mobiles, certains continuent de gérer leurs trafics depuis l’intérieur des prisons tandis que d’autres se contentent d’un usage récréatif de l’outil numérique.
Des détenus qui s’improvisent influenceurs sur les réseaux sociaux
Sur Instagram, Tiktok ou encore Facebook, les détenus stars sont de plus en plus fréquemment présents et suivis par les internautes. Des personnes qui partagent leur quotidien en prison ont réussi à animer de véritables communautés et voient leurs photos, vidéos et publications regardées, commentées et partagées par de nombreux followers.
Malgré l’interdiction d’utiliser Internet en prison, certains agissent à visage découvert et dénoncent leurs conditions de détention malgré les risques encourus.
Comment l’administration pénitentiaire lutte-t-elle contre l’usage d’Internet en prison ?
Pour lutter contre l’usage illicite d’Internet en prison, les établissements pénitentiaires accentuent les fouilles des cellules tandis que d’autres ont placé des brouilleurs à proximité de leurs structures. Ces dispositifs ont un impact sur le quotidien des détenus, même si ceux-ci continuent de se faire livrer de nouveaux smartphones depuis l’extérieur. Certains disposent même d’une connexion renforcée par des opérateurs qui augmentent la puissance du réseau pour déjouer les brouilleurs afin que la population qui réside à proximité des prisons ne soit pas lésée.
Mobilisation pour l’accès à Internet en prison : des avancées timides malgré une forte demande
Depuis un an, une trentaine d’organisations militent pour permettre l’accès à Internet dans les prisons. Les avancées restent cependant limitées, et les droits fondamentaux des détenus continuent d’être compromis.
Une demande datant de 2022
Dans une lettre ouverte à la Première ministre le 28 septembre 2022, près de 650 personnes, incluant enseignants, travailleurs sociaux, personnels de santé, avocats et anciens détenus, ont souligné l’importance de l’accès à Internet en prison. Cet accès est crucial pour reconnaître les détenus comme sujets de droits, réduire leur exclusion sociale et faciliter leur réinsertion.
Les initiatives en cours
Malgré une campagne collective pour réduire la fracture numérique en milieu carcéral, l’accès généralisé à Internet reste absent des priorités politiques. Le ministère de la Justice a annoncé deux projets pilotes en avril 2023 :
- Formation au codage informatique : Un panel de détenus pourra accéder à une liste restreinte de sites pour des formations professionnelles.
- Accès à France Connect : Dans trois structures d’accompagnement vers la sortie, les détenus en fin de peine pourront utiliser ce portail pour leurs démarches administratives.
Collectif « Internet en prison »
Ces initiatives ne concernent qu’environ 3% des détenus, laissant la majorité sans accès. Le collectif « Internet en prison » plaide pour une approche globale et systématique, insistant sur la nécessité d’une impulsion politique et d’une coordination interministérielle.
❌🌐Internet est incontournable au quotidien : démarches administratives, droit à l'éducation, accès aux droits... Pourtant, plus de 77 000 détenus en sont privés. Cette double peine doit cesser. #InternetEnPrison est aussi urgent qu'indispensable !
— Observatoire international des prisons (OIP) (@OIP_sectionfr) May 16, 2024
▶️ https://t.co/obVvTn3p5Y pic.twitter.com/vjQs0xDI1r
Quelles sont les conséquences de l’absence d’Internet en prison ?
Les détenus restent privés de nombreux droits et opportunités, notamment l’éducation en ligne, les démarches administratives et l’accès à des informations essentielles. L’accès à Internet est vu comme un outil d’émancipation et de réduction de la récidive, soulignant son importance pour la réinsertion des détenus et le bénéfice de la société.
L’exemple de pays comme l’Allemagne, l’Australie ou la Suisse montre que les contraintes de sécurité peuvent être surmontées, et les experts en cybersécurité affirment que ces obstacles ne sont pas insurmontables.
Pour plus d’informations, vous pouvez vous rendre sur le site internet-en-prison.fr ou consulter le dossier de presse de l’OIP.
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Questions fréquentes au sujet d’Internet en prison
Comment les détenus arrivent-ils à se procurer un smartphone pour surfer sur Internet ?
Les smartphones se trouvant en prison sont directement acheminés depuis l’extérieur par différents biais. Les drones, les paquets jetés par-dessus les clôtures des prisons ou encore les parloirs sont les principales portes d’entrée d’Internet dans les cellules des prisons.
Quels genres de vidéos les détenus publient-ils sur Internet ?
Les détenus publient toutes sorties de vidéos sur Internet. Certains témoignent de leurs conditions de détention, partagent des recettes de cuisine réalisées avec très peu d’ustensiles, effectuent des chorégraphies…
Que risquent les détenus qui publient du contenu sur tiktok ?
En plus de faire l’objet de sanctions disciplinaires après la saisie de leur smartphone, les détenus qui publient du contenu sur Tiktok ou qui sont pris la main dans le sac en train de surfer sur Internet risquent d’autres problèmes.
Un passage au mitard, la suspension des réductions de peine, des charges supplémentaires ajoutées au dossier et de nouvelles poursuites judiciaires sont autant de contraintes qui peuvent être rencontrées par les détenus qui utilisent Internet en prison.
Comment les détenus rechargent-ils leur forfait Internet ?
Pour recharger leur forfait Internet depuis la prison, les détenus bénéficient bien souvent d’un proche complice à l’extérieur. En effet, il suffit à ce dernier d’aller acheter une carte prépayée au bureau de tabac et de fournir à son proche incarcéré les codes présents sur la carte pour qu’il puisse de nouveau utiliser Internet depuis la cellule de la prison au sein de laquelle il évolue.