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Ramadan 2024 en détention : une période de jeûne respectée par de nombreux détenus

Ramadan 2024

Pour éviter de sombrer, les détenus sont nombreux à pratiquer leur religion derrière les barreaux des prisons françaises. À l’heure où les musulmans du monde entier pratiquent le jeûne pendant la période du ramadan, les personnes incarcérées tentent tant bien que mal, elles aussi, de respecter les règles qui incombent à ce mois saint. Voici les principales difficultés rencontrées en milieu carcéral par les détenus et leurs proches ainsi que les dispositifs qui existent en prison en faveur de ceux qui souhaitent respecter ce pilier important de l’Islam.

La période de ramadan en prison et ailleurs

Pour la communauté musulmane de France et d’ailleurs, le ramadan représente l’un des cinq piliers de l’Islam et par conséquent, une période primordiale pour exprimer sa foi. En prison, la religion occupe une place très importante pour de nombreux détenus.

En effet, pour ne pas sombrer, ces derniers se rapprochent bien souvent de Dieu et l’administration carcérale prévoit quelques aménagements pour que ce moment de recueillement se déroule dans les meilleures conditions et ce, malgré une période de détention qui n’est pas toujours propice au jeûne.

Des temps de prières en prison tous les vendredis

Chaque vendredi, en période de ramadan, mais aussi tout au long de l’année, les personnes qui souhaitent pratiquer leur religion peuvent se rapprocher des aumôniers. Le temps de quelques heures, les détenus peuvent prier, avoir des discussions sur la foi, sur leur engagement envers Dieu, mais ce créneau est aussi surtout l’occasion de se repentir des péchés qui les ont menés en prison.

Des jeûneurs qui peuvent se déclarer pour une meilleure organisation des repas

Pendant la période du ramadan, les jeûneurs sont invités par l’administration pénitentiaire à se déclarer afin qu’une meilleure organisation des repas soit possible. Cela permet aux détenus qui jeûnent de ne pas voir arriver la gamelle du midi en cellule et de bénéficier d’une collation supplémentaire le soir.

Cependant, bon nombre de personnes écrouées, par peur d’être stigmatisées ou encore d’être fichées S pour radicalisation, renoncent à ces aménagements conçus pour rendre plus confortable la période de jeûne en préférant taire leur démarche religieuse.

Davantage de solidarité en cellule et dans les coursives des établissements pénitentiaires

En prison, la période du ramadan est souvent source d’une solidarité accrue entre détenus. Durant ce mois sacré, les plus démunis se voient souvent remettre par leurs pairs des denrées alimentaires et d’autres produits indispensables au quotidien tandis que des plats sont partagés entre personnes écrouées.

En cellule, à la tombée de la nuit, les pratiquants rompent le jeûne ensemble en savourant des mets confectionnés à l’aide de produits cantinés pour l’occasion. Le ramadan 2024, comme tous les autres ramadans, parvient à rester un moment convivial, axé sur le partage et la spiritualité, et ce, même derrière les barreaux des prisons.  

Les principales difficultés rencontrées par les musulmans et leurs proches durant ce ramadan 2024 

Pourtant, pour les détenus musulmans, mais aussi pour leurs familles, le ramadan peut être vécu difficilement. En effet, durant cette période qui se vit généralement en famille, l’absence d’un proche se fait doublement ressentir, tandis que la précarité carcérale rend encore plus ardue l’obligation de jeûner pendant la journée.  

L’éloignement de la famille en période de jeûne difficile à vivre pour les détenus musulmans

Dans les familles musulmanes, le ramadan se pratique en famille. Durant ce mois sacré, on se réunit pour rompre le jeûne, pour préparer les repas qui seront savourés à la nuit tombée, mais aussi pour la grande fête de l’Aïd qui a lieu à la fin du mois saint. Cet évènement, apprécié de tous, donne lieu à des célébrations en grande pompe, à la délivrance de cadeaux et les enfants sont généralement friands de cette journée qui peut s’apparenter aux fêtes de Noël.

Être éloigné des siens pendant cette période peut être difficilement vécu par les détenus. Si certains ont la chance de recevoir des visites hebdomadaires de leur famille au parloir de la prison, d’autres sont contraints de supporter un isolement dû à l’éloignement géographique ou à un contact perdu avec leurs proches. Le jeûne mais aussi les fêtes qui marquent la fin du ramadan sont d’autant plus compliquées à mener lorsqu’on est incarcéré.  

Des proches de détenus qui vivent encore plus mal l’incarcération pendant le jeûne

Les familles, elles aussi, déplorent l’absence d’un de leurs membres lors des repas qui ont lieu pendant cette période sacrée. Certaines font de nombreux sacrifices pour se rendre régulièrement au parloir et soutenir leur proche détenu tandis que d’autres envoient la majeure partie de leurs revenus en prison pour s’assurer que la période de jeûne soit vécue dans de bonnes conditions par celui qui ne sera pas présent pour fêter la fin du ramadan en 2024.

Une proximité mal supportée par les détenus qui respectent la période du ramadan

Si l’on note une recrudescence d’actes de solidarité pendant le ramadan en prison, qui intervient via des dons de nourriture, des partages de repas ou encore de produits d’hygiène qui manquent aux plus démunis, la période est aussi source de conflits.

Pendant la journée, certaines personnes écrouées peinent à supporter la proximité avec leurs co-détenus et celle-ci est quasi-systématique à cause de la surpopulation carcérale qui sévit dans nos établissements pénitentiaires.

La faim, l’absence de consommation de tabac et l’obligation de partager un espace clos avec une personne qui ne pratique pas forcément le jeûne sont autant d’éléments qui rendent encore plus difficilement supportable la période du ramadan en prison.

Les détenus en situation de pauvreté carcérale qui peinent à s’alimenter convenablement pendant le ramadan

Les indigents, qui ne disposent pas de fonds assez conséquents pour pouvoir commander des denrées alimentaires à la cantine de la prison, sont ceux qui sont les plus éprouvés durant le ramadan. Pour se nourrir, ces derniers ne peuvent compter que sur la solidarité de leurs pairs et sur les repas offerts par l’administration pénitentiaire. Les jeûneurs perdent généralement rapidement du poids puisqu’ils ne s’alimentent bien souvent pas assez le soir et leur santé peut être malmenée lorsque le mois saint touche à sa fin. Lorsque ces derniers rencontrent des problèmes médicaux liés à leur incapacité de se nourrir assez, il arrive qu’ils soient contraints de renoncer à leur période de jeûne.

les produits hallal, grands absents de certains catalogues de cantine

Dans certains établissements pénitentiaires, comme à la maison d’arrêt de Moulins-Yzeure, les détenus ne parviennent pas toujours à accéder à des denrées alimentaires conformes à leur régime religieux.

Par exemple, la cantine de la maison d’arrêt de Moulins ne propose depuis récemment que très peu d’aliments hallal et la viande appréciée des détenus, est malheureusement quasiment absente des catalogues qui permettent d’acheter de quoi s’alimenter pendant la période du ramadan.

Malgré les plaintes de ceux qui souhaitent respecter les engagements liés à leur foi, l’administration carcérale ne semble pas se soucier des revendications portées par ces derniers alors que la maison centrale située au sein du même centre pénitentiaire, elle, propose toujours une feuille de cantine bien garnie.

Des précautions prises par l’administration pénitentiaire en période de ramadan 

En revanche, les détenus qui se signalent à l’administration pénitentiaire via une inscription au « programme ramadan », eux, peuvent bénéficier de certains avantages qui sont de grands alliés en cette période de jeûne. Les plus précaires d’entre eux peuvent d’ailleurs vivre plus confortablement ce moment tandis que les familles peuvent parfois avoir la chance d’être réunies au moment de fêter l’Aïd.

Des repas plus conséquents et des denrées alimentaires spécifiques pour les détenus qui jeûnent

Les détenus qui jeûnent et qui ont indiqué leur démarche à leur établissement pénitentiaire peuvent bénéficier d’une collation livrée le midi en guise de gamelle et de davantage de féculents lors de la livraison de leur repas du soir. Ce coup de pouce, même s’il est minime, permet aux concernés de bénéficier d’aliments qui peuvent facilement être stockés puis consommés durant la nuit et de s’alimenter davantage une fois la nuit tombée. Il est notamment très apprécié de ceux qui ne peuvent malheureusement pas cantiner de produits, faute à des moyens financiers réduits.

Des colis délivrés par le Secours islamique aux personnes écrouées qui pratiquent le jeûne

Des dattes, des abricots , des raisins, du bouillon, une brique de jus ou encore de lait sont autant d’éléments qui composent les colis délivrés chaque matin aux détenus qui pratiquent le jeûne par le Secours islamique qui œuvre en prison.

Pendant toute la durée du mois du ramadan, ceux qui sont dans le besoin peuvent compter sur ces aliments pour vivre plus confortablement le moment de rompre leur jeûne.

Les fêtes de l’Aïd, parfois célébrées en famille grâce au déploiement des UVF

Pour l’Aïd, certains détenus ont la chance d’être entourés de leurs enfants et d’un conjoint ayant auparavant pris soin de réserver une UVF. Pour rappel, l’unité de vie familiale permet aux personnes incarcérées de passer jusqu’à 72 heures dans un appartement qui appartient à l’administration pénitentiaire, avec sa famille, en bénéficiant de tout le confort d’un logement.

À la fin d’une période de jeûne difficilement menée en prison, ce moment offre un réel réconfort aux musulmans qui ont la chance de pouvoir en profiter.

Des surveillants parfois plus conciliants pendant la période du ramadan

Pour permettre aux détenus de vivre plus facilement le moment propice au partage et au recueillement qu’est le ramadan, certains surveillants pénitentiaires se montrent plus conciliants.

Ce laxisme améliore aussi largement les conditions de détention de ceux qui sont contraints de jeûner loin des leurs, tout en subissant une proximité forcée.